jeudi 5 mai 2011


Rencontre avec Clement Moore Henry, politologue américain : L’UGEMA, la fleur de l’élite algérienne

«L’UGEMA était une association qui avait sa propre ligne de conduite, c’était une pépinière de cadres universitaires, une association solide dont l’histoire peut être utile pour les générations à venir. »

Dans le carde des « rencontres Algérie News » à la librairie Socrate News  et ce à l’invitation de Mme Khalida Toumi, ministre de la Culture, le politologue américain Clement Moore Henry a animé une conférence autour de la sortie de son ouvrage, sorte de volumineux essai, intitulé « L’UGEMA (1955-1962) Témoignages » qui vient de paraître aux Editions Casbah, un ouvrage qui est actuellement en cours de traduction en langue arabe.
Ce livre qui est le résultat d’une série d’entretiens que l’auteur a réalisé avec ses camarades de l’union Générale des Etudiants Musulmans Algériens qu’il a bien connus lors de son séjour en France en 1957. L’auteur qui se trouvait alors à Paris pour entamer des études de droit était représentant de l’union nationale des étudiants américains et avait pris position au cours d’un congrès tenu en août  en faveur des étudiants algériens pour exprimer sa solidarité avec la cause algérienne.
 Lors d’une conférence , Clement Moore Henry  n’a pas mâcher ses mots en parlant des « conditions ignobles du colonialisme français » qui avait privé de leurs droits les étudiants algériens  qui ne désiraient par-dessus tout qu’une seule chose: l’indépendance de l’Algérie. C’est cette expression non nuancée qui a déplu à la police française qui vaudra à l’auteur une expulsion manu militari de France.
«Il y a toujours  une ligne assez fine entre les doléances et l’activité syndicale et la politique mais dans cette situation révolutionnaire de l’Algérie, les étudiants algériens avaient repris leurs études après la grève illimitée au mois de mai 1956 » affirme notre conférencier qui va, nourri de cette expérience, changer de trajectoire en optant pour des études en sciences politiques.
Il reviendra en France de temps en temps et prépare une thèse de doctorat sur la Tunisie ayant pour thème l’étude des possibilités démocratiques dans le parti unique. Ensuite, en 1962 il obtient un laissez-passer pour l’Algérie où il découvre –dit-il- la zone autonome , la wilaya IV, les Benbellistes à Tlemcen qui étaient en pleine lutte  de pouvoirs entre les différentes unités du GPRA, FLN, ALN et Etat-major algérien. En 2005, il reprend contact avec ses anciens amis et militants de l’UGEMA qui feront plus tard de brillantes carrière dans la diplomatie-à l’occasion de la célébration du 50ème  anniversaire de l’UGEMA dans la ville de Tlemcen.
C’est au cours de cette manifestation que notre auteur a l’idée d’écrire un livre pour rappeler le combat de ses camarades algériens durant la guerre de Libération et utiliser ses connaissances de spécialiste en la matière pour leur rendre hommage.
Il recueille plus de 30 témoignages en procédant à l’enregistrement  des témoins de cette époque pour publier au final un essai de plus 630 p. Même si l’échantillon selon notre interlocuteur n’est pas exhaustif dans la mesure où ce ne sont pas tous les témoignages des militants de l’UGEMA, le livre comporte les récits des principaux présidents de l’organisation syndicale à savoir Taleb el-Ibrahimi, Mouloud Bélaoune et Aït- Chaalal.  «  J’ai concentré mon travail sur la période  allant de 1955 à 1962 qui couvre l’histoire de l’UGEMA parce que c’était la période charnière entre la colonie et l’indépendance, il y avait 589 étudiants sur un total de 6000. C’était très peu par rapport à la Tunisie» explique notre conférencier.
L’ouvrage donne à lire à travers ces récits une certaine idée des rapports entre l’UGEMA et le FLN et met en exergue l’existence au sein de cette organisation d’un syndicat autonome dont la pratique a été initiée dès 1919 avec l’union des étudiants de l’Afrique du Nord.
Dans cette communication le politologue évoque deux interprétations sur la création de l’UGEMA, celle qui voudrait que Belaïd Abdessalem soit le père fondateur de l’organisation  avec comme noyaux le M.T.LD et le P.P.A et celle selon laquelle le militant Abane Ramdane serait à Alger à l’origine de sa naissance et dans cette mesure l’U.G.E.M.A  aurait reçue des mots d’ordres émanant directement du FLN.
Pourtant selon Clement Moore Henry,  «L’UGEMA était une association qui avait sa propre ligne de conduite, c’était une pépinière de cadres universitaires, une association solide dont l’histoire peut être utile pour les générations à venir. »
Lynda Graba.

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