lundi 27 juin 2011

Amar Sundy. Chanteur franco-algérien de blues saharien

«Je fais de la musique à cause de mes origines»


 
 Le soulman Amar Sundy
D’origine targuie, Amar Sundy exploite dans ses créations musicales, à base de blues et de soul, les rythmes et les percussions du Sahara. Certains l’appellent «le bluesman targui», d’autres «le bluesman du Sahara». Lui aime dire qu’il interprète du blues algérien. Amar Suny a côtoyé des grands noms du blues et de la soul américains, tels que BB King, Buddy Miles ou Big Joe Duskin. Il connaît presque par cœur tout le patrimoine blues des Etats-Unis. Il n’a pas cessé de faire des recherches sur les mélodies et les percussions sahariennes. Il a produit plusieurs albums, dont Najma, Live and blues, Homme bleu et Sadaqa.
Des opus qui soulignent un incessant voyage vers la perfection et vers les orignes. Amar Sundy a participé au neuvième Festival international du jazz de Constantine (Dimajazz 2011).
-Le mélange du blues et du saharien est chez vous le résultat d’un long parcours artistique, n’est-ce pas ?
Le fait d’avoir été aux Etats-Unis et d’être plongé dans le blues, la musique noire américaine, je me suis rendu compte, au bout d’un certain temps, que les racines de ces musiques me rappelaient les miennes.
Il y a eu un effet de rétroviseur. Nous avons les mêmes rythmes chez nous. Pas le même son, pas la même façon de jouer, mais c’est proche.Cela m’a amené, d’une certaine façon, vers chez moi. J’ai commencé à mettre de plus en plus de percussions dans mes compositions. Je sortais un peu de cette fusion jazz, rock, blues pour aller vers les mélodies sahariennes. Ce travail s’est déroulé sur une quinzaine d’années.
-Avez-vous fait des recherches pour les mélodies ?
Je me suis surtout basé sur les percussions parce que j’aime beaucoup le tbal et le bendir. J’ai juste ajouté les mélodies que j’entendais dans ma tête en remontant les souvenirs.J’ai repris tout ce que j’ai entendu dans ma vie, dans mon enfance. Des mélodies qui se sont déformées avec le temps. J’ai donc fait ma propre fusion.
-Et quel a été l’accueil de cette fusion lorsque le public l’a entendue pour la première fois ?
J’ai commencé en 1990 avec l’album Najma. Tous ceux qui l’ont écouté m’ont dit : «Tu devrais faire cela». Mais je n’avais pas de référence, pas de maître, pas de standards. Donc, il fallait que je crée mon propre univers. Cela a demandé du temps. Petit à petit, et sans forcer les choses, j’y suis arrivé.
-Et pour les textes chantés…
Il s’agit de mes propres textes inspirés du mode sahraoui nord-africain, surtout algérien. J’évoque un peu ma vie et des gens que j’ai croisés.Ce n’est que de la poésie. Dans le blues, on raconte les choses de la vie, la vie de tous les jours. Je l’ai fait aussi à ma manière depuis que j’ai quitté l’Algérie.
-Et quand vous dites «à ma manière», cela veut dire quoi ?
A partir du moment où j’ai commencé à introduire les mélodies, il fallait quelque chose qui me corresponde pour que je boucle la boucle. En fait, mettre tout ce que je ressentais dedans.
-Est-il facile d’adapter la langue arabe au blues ?
Oui, quand c’est naturel et que ça sonne bien. Quand je vois que les mots «accrochent», je me débrouille pour avoir des synonymes ou quelque chose qui a un rapport avec le sens.La langue arabe est très riche.  Si j’étais totalement du côté occidental et si je ne connaissais pas l’arabe, cela aurait pu être plus difficile. J’aurais chanté faux ! Moi, je suis à l’aise en anglais, en arabe, en français. J’utilisais les mots que j’ai appris au Sahara. Le tamachaq est dur à comprendre.
-Et quand on dit que vous êtes le bluesman targui, cela vous plaît-il ?
J’aime bien qu’on dise «blues d’Algérie». Cela correspond plus à mon style. Mes origines sont targuies. Sincèrement, cela ne me plaît pas, beaucoup me surnomment «bluesman targui».   Je ne fais pas de la musique parce que je suis ceci ou cela. Ce n’est pas à cause de mes origines.
-Pourquoi avoir choisi le blues ?
Il y a toute une pléiade d’artistes des années 1940-1950, comme T. Bone Walker, Jimmy Whiterspoon ou Buddy Guy, qui ont interprété le blues sachant que son origine est africaine. Dans tout cela, j’ai retrouvé quelque chose qui me touchait. Il y a quelque chose qui me parlait. Je ne peux pas l’expliquer.
-Vous avez déjà fait un passage à Alger ...
C’était en 2009. Un concert à Riad El Feth où j’ai interprété une musique différente, très fusion, blues, jazz. Et là, au Dimajazz, je suis content avec la présentation de mon album Sadaqa. Ce n’est même pas un retour aux sources. J’ai trouvé la façon d’exprimer ce qui a marqué mon cheminement artistique avec mon propre mélange. Ma base est toujours blues, mais au niveau des compositions cela peut être différent.
-Dans votre concert au Dimajazz, on a distingué deux phases, l’une plus rapide que l’autre...
Oui, parce que le public était demandeur, en avait envie. Le public voulait un peu de blues américain. J’avais déjà assez communiqué mon style. Je voulais dire au public que je viens aussi de cette musique, du blues. Le public voulait quelque chose de l’extérieur. Moi, je suis à l’extérieur et j’ai ramené quelque chose d’ici avec un certain mélange. Le but est de communiquer ensemble.
-Vous dites souvent, il y a de la vie dans la musique. Pourquoi ?
Oui, car je raconte l’histoire de ma vie, l’émigration, les bidonvilles, le manque d’eau, les gens du voyage, notre identité, la recherche de nous-mêmes….
Fayçal Métaoui

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