mercredi 13 juillet 2011


La danse, art de l’expression corporelle



LA DANSE FOLKLORIQUE DANS LES PAYS AFRICAINS CONSTITUE, AU-DELÀ DE SA DIMENSION CULTURELLE ET ESTHÉTIQUE, UN MODE D’EXPRESSION CORPORELLE REFLÉTANT LA BEAUTÉ INTÉRIEURE (INVISIBLE) DE LA PERSONNE, CONTRAIREMENT À LA DANSE OCCIDENTALE LIMITÉE AU SEUL ESPRIT DE BEAUTÉ, ONT SOUTENU DES INTERVENANTS AU TITRE DU COLLOQUE ORGANISÉ À TIZI OUZOU EN MARGE DE LA 6E ÉDITION DU FESTIVAL CULTUREL SOUS LE THÈME «LA DANSE ET LE PUBLIC».
Pour exprimer leurs sentiments mais aussi leur manière de vivre au quotidien, les Africains plus particulièrement s’adonnent à la danse et à la musique, considérées comme étant un moyen de communication, a estimé l’Ivoirien Adepo Yapo, compositeur et musicologue dans sa communication intitulée «la danse et le public : une synergie créatrice d’esthétique». «La danse est l’art de l’expression corporelle. Elle est basée sur les mouvements du corps, tous les muscles sont concernés, y compris ceux du visage. Ces mouvements sont généralement organisés selon une certaine composition et effectués selon un certain rythme. C’est un art très ancien ; des peintures datant de 20 000 ans montrent des personnages qui dansent», a-t-il dit. Les danseurs africains, a-t-il poursuivi, développent et font partager la pratique des arts chorégraphiques africains. Comparant la danse africaine à celle de l’Occident, le conférencier dira que chaque peuple de la planète danse pour exprimer des motifs qui lui sont propres, et de façon différente, révélatrice de leur mode de vie. Le mouvement, le geste et la beauté du corps sont considérés comme un outil et moyen d’expression socioculturelle, revêtant une forte charge symbolique, exprimant le rapport de l’homme à la terre, à Dieu, à la communauté des vivants et des morts, selon le conférencier. «La danse peut-être un mouvement spontané correspondant à un besoin de libération nerveuse avec peu de maîtrise dans l’expression, une improvisation mêlant spontanéité et exécution de pas avec un certain sens du mouvement et du rythme, un divertissement de passionnés avec un travail méthodique sur les mouvements, les pas et les temps comme cela été le cas pour la valse, le tango, la salsa, le flamenco et le rock», selon l’intervenant. Les mouvements du corps les plus courants sont la rotation, la torsion, la flexion, l’extension et divers sauts et les différentes parties du corps du danseur décrivent des trajectoires variées, alternant équilibre, accélération et ondulations. L’Occident a peu développé les danses sacrées, l’Eglise chrétienne les ayant condamnées pour immoralité après le moyen-Age. L’Afrique se caractérise par une intuition et une improvisation extériorisée. L’Asie, par ailleurs, met l’accent sur une expression plus intérieure, où se mêlent abstraction, méditation et rituel. «Chaque danse a une légende et une histoire où se côtoient le réel et l’imaginaire qui ont forgé l’identité africaine depuis la nuit des temps», a conclu le conférencier. Pour sa part, M. B. Nathalie Santisteban-D, doctorant à Cerma (France) et Ilai (Pérou) a estimé qu’au Pérou, «la danse et le rituel du Carnaval expriment la préoccupation de la société péruvienne pour assurer sa continuité comme société et culture» par rapport aux récoltes et à la reproduction animale. La fête du carnaval est d’origine occidentale introduite par les espagnols à la conquête du Pérou en 1532. Dans sa communication intitulée «la fête du Carnaval dans les Andes du Pérou», la conférencière a défini le carnaval comme un événement célébré au mois de février ou mars comme étant «des rituels de fertilité de la terre et de la reproduction animale». Dans les villes du Pérou, cet événement, «adapté, ré-intérprété et approprié», est célébré selon la tradition catholique, alors qu’au niveau des villages et communautés des Andes (agriculteurs et bergers, la culture traditionnelle des ancêtres, les rituels de fertilité et de sacrifice notamment y sont associés. «Le carnaval est une fête en relation avec une forme de libération, d’interruption totale ou partielle du travail et des activités quotidiennes, et est célébrée dans un contexte consacré à la réalisation des rituels en association avec les divinités catholiques (mercredi des Cendres) et non catholiques (la terre, la montagne)», a-t-elle dit. Les événements festifs peuvent être considérés comme des situations de «désordre» qui transforment l’espace et le temps ordinaires en temps rituels qui représentent des moments privilégiés pour la construction et la réaffirmation des altérités et identités, a-t-elle poursuivi. Considérant que les rituels, la danse, les chants et la musique ont un rôle fondamental dans la représentation symbolique de la fertilité, de la procréation et de la continuité et la pérennité de la culture. «Avec ces rituels, la population cherche l’abondance des récoltes et la multiplication d’animaux, renouvelant (sa) relation de «réciprocité-dépendance» avec les divinités. Les festivités du carnaval se déclinent sous forme de musique, de danse et de chants exécutés selon les rituels. «Souvent, la chanson traditionnelle est considérée comme un poème avec une musique qui exprime le sentiment et la pensée d’une culture. Elle est une forme de communication puissante et sémantiquement complexe. Les chants du carnaval font implicitement allusion à des unions sexuelles ritualisées avec un fort contenu sexuel et érotique, en faisant référence aux plantes, aux animaux, à la terre et aux êtres humains», explique Natalie Santisteban. Dans la danse, l’union des opposés complémentaires s’exprime à travers le langage visuel et corporel. «A chaque demande masculine coïncide une réponse féminine», a-t-elle dit. La danse est un mouvement de va-et-vient constant, entre le passé et le présent et représente «une séduction» censée «enchanter» l’autre. La musique, quant à elle, constitue un moyen de transmission de la culture, révélant des changements importants dans le cycle vital. «A travers la musique, on transmet du plaisir sensuel et de la stimulation intellectuelle. Souvent, la musique représente une autre forme de communication et d’interprétation symbolique». La musique est exécutée à l’aide d’une banduria, un instrument à corde d’origine européenne du XVIe siècle et qui ressemble au laud ou à la cithare. La banduria est en relation avec l’image et la sirène, une association ayant un rôle dans le processus de socialisation que les jeunes célibataires ont pendant la fête du carnaval, permettant la communication entre le côté masculin et le côté féminin. «A travers le son, les jeunes hommes célibataires peuvent attirer et conquérir les filles célibataires», selon la conférencière.

RABAH M.

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